Blaise compaoré

Burkina Faso : Blaise Compaoré sort de son silence

Alors que le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) traverse une crise pour l’investiture d’un candidat à la présidentielle de 2020, son fondateur, l’ex-président Blaise Compaoré, est sorti de son silence pour remettre de l’ordre au sein de ses troupes. En reprenant la main sur son parti, réussira-t-il à empêcher l’implosion de sa famille politique ?

« Le médiateur », comme le surnommaient ses compatriotes, a repris du service. Blaise Compaoré, qui gardait le silence depuis sa chute le 31 octobre 2014 et son installation en Côte d’Ivoire, a tenté de réconcilier les cadres de son parti. L’ancien président s’est exprimé dans trois lettres, toutes datées du 11 octobre. Dans la première, adressée à Eddie Komboïgo, président du CDP, il « regrette de ne pas avoir été consulté sur la nature et le niveau des sanctions prononcées contre un certain nombre de camarades ».

Dans la deuxième, adressée à Léonce Koné, ancien deuxième vice-président du parti, Blaise Compaoré recommande que « les querelles intestines soient gérées conformément aux dispositions des statuts et règlements ». Le président d’honneur du parti demande également que les sanctions soient « rapportées ». Enfin, dans la troisième lettre, il appelle les militants du parti « à resserrer les rangs » en vue des prochaines échéances électorales.

Quelques jours plus tôt, du 8 et 10 octobre, il avait reçu à son domicile à Abidjan trois représentants de chacun des deux camps, afin de les inciter à enterrer la hache de guerre.

Querelles intestines

Comment sa formation politique, qui fut à la tête du pays pendant une vingtaine d’années, en est-elle arrivée là ? Le CDP s’est déchiré en raison d’une expérience inédite pour l’ancien parti-État : la désignation d’un candidat pour la présidentielle. Depuis plusieurs mois, la tension ne cessait de monter entre les partisans de Kadré Désiré Ouédraogo, ancien Premier ministre, et Eddie Komboïgo.

Ces querelles intestines s’étaient soldées par la suspension et l’exclusion de 27 cadres et militants lors d’un congrès le 22 septembre à Ouagadougou. Dans la foulée, l’ancien Premier ministre, qui avait entre temps lancé le Mouvement Agir ensemble, annonçait sa démission du CDP, suivi par d’autres cadres.

Il a décidé de remettre de l’ordre

« Blaise Compaoré a constaté que son parti allait à la dérive. Il a donc décidé de remettre de l’ordre », glisse un membre de son entourage. « Il a fondé et entretenu le parti jusqu’à présent. Il est normal qu’il vienne en aide si sa famille politique traverse des difficultés », estime Assimi Kouanda, ancien président du CDP et ex-directeur de cabinet de Blaise Compaoré.

Malgré les tensions, chacun des deux camps a toujours clamé sa « fidélité » à l’ancien président, et tous réclament son retour au Burkina.

Blaise Compaoré « montre que c’est lui le patron »

Lors d’une conférence de presse au siège du parti le 14 octobre, Achille Tapsoba, vice-président du CDP, s’est voulu rassurant. « La direction est en phase avec le président d’honneur » et les sanctions seront « rapportées ». Seules comptent les prochaines échéances électorales. Du côté des partisans de Kadré Désiré Ouédraogo, aucune réaction officielle. Mais certains se réjouissent de l’intervention de Blaise Compaoré, jugeant les sanctions contre ce camp « abusives ».

La loyauté envers blaise compaoré demeure

En reprenant la main sur le dossier, le « président d’honneur à vie » démontre sa mainmise sur le parti. « Malgré les divergences d’opinion, la loyauté envers Blaise Compaoré demeure. Par cette prise de position, il montre que c’est lui le patron, et que c’est aussi lui qui va désigner le candidat », croit savoir un de ses proches.

Pour autant, le retour de tous les membres sanctionnés et démissionnaires n’est pas encore garanti. Selon Vincent Ouattara, professeur d’anthropologie culturelle à l’université de Koudougou, auteur d’essais politiques dont L’ère Compaoré : crimes, politique et gestion du pouvoir, Kadré Désiré Ouédraogo a quitté le CDP pour deux raisons. « Il a perçu la sanction de ses proches comme une chasse aux sorcières, et est donc parti par solidarité. Deuxièmement, son départ permet d’éviter la confusion. Il ne participait plus aux rencontres du parti. Cela permettait de régler cette rivalité nauséabonde au CDP. »

Jeuneafrique.com

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