En attendant d’avoir l’ensemble du rapport, il me vient à l’esprit ce fameux dicton : « selon que vous êtes riche ou pauvre, la justice vous blanchira ou condamnera ». Rapporté à notre situation « selon que vous êtes proche ou pas de Ibriga, l’ASCE-LC fera un rapport qui vous dédouane ou enfonce ».
L’ASCE-LC a rendu son rapport d’audit de la gestion de la transition commandité par Zida, avant son départ, et demandé par Roch à sa prise de fonction. L’audit sur la gestion a été complété, actualité oblige, par une investigation sur les parcelles de Ouaga 2000.
Sur le premier rapport, la gestion de la transition, l’ASCE-LC fait des constats grave mais en tire des conclusions édulcorantes. La transition a fait trop de gré à gré, plus de 55% des marchés publics passés, de très loin supérieurs à la norme communautaire (UEMOA) qui est de 15%. Une situation qui aggrave le risque de corruptions et de détournements ; constate Ibriga, mais qui s’empresse de conclure au contexte particulier de la transition. On peut donc, si le contexte l’exige, outrepasser de très loin, les normes, c’est pas grave. Ce sont finalement les contextes qui dictent le respect ou pas des normes. Le rapport de synthèse présenté laisse peu de place au débat, puisqu’il ne renseigne pas sur chacun des marchés. Or si le gré à gré est bien prévu, il est strictement encadré. L’exposé de chacune des situations aurait permis de savoir si le gré à gré s’imposait vraiment.
Et puis la pirouette qui ferme tous les débats. Les pratiques délictueuses avaient aussi cours sous l’ancien régime. Et vlan ! Kouma bana, comme disent les Bambara. Si cela avait cours sous Blaise, le reproduire n’est pas une faute. Tant mieux alors. C’est bon à savoir. Les avocats des ministres de Blaise Compaoré, poursuivis pour des pratiques de mauvaises gestions, pratiquent qui avaient cours sous Blaise, ont là un excellent moyen de défense. Les pratiques tant qu’elles avaient cours sous l’ancien régime sont affectés de circonstances atténuantes. Comme c’est le cas, il faut que tout le monde en bénéficie. On ne peut pas imaginer qu’une telle disposition ne prévale que pour un camp.
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Et puis la pirouette qui ferme tous les débats. Les pratiques délictueuses avaient aussi cours sous l’ancien régime.
Et vlan ! Kouma bana, comme disent les Bambara.
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Un autre aspect du rapport ; les comptes de dépôts. Sur ce point particulièrement, l’investigation de l’ASCE-LC était attendue. Il faut se souvenir qu’en juillet 2015, au moment de la grave crise RSP-Zida, les malversations dans la gestion des comptes à dépôt avaient été soulevées. Ceux qui étaient dans les secrets de la gestion s’en inquiétaient. Des preuves de mal gestion avaient été documentées et remises à Michel Kafando qui n’en n’avait pas tenu compte. Le rapport de l’ASCE montre qu’au premier ministère et au ministère de l’Administration territoriale on s’est vraiment lâché. Le constat est qu’il y a plus de 5 milliards de dépenses irrégulières, dont plus de 500 millions de dépenses non éligibles. Sur 5 milliards de dépenses irrégulières, plus de 3 milliards sont le fait du premier ministère et du MTDS, longtemps gouverné par le tout puissant Auguste Denise Barry. Dans le rapport de synthèse de l’ASCE-LC nulle part il est indiqué que c’était grave. Il y a eu là aussi une pirouette pour relativiser. L’approche par comparaison : « Ces dépenses irrégulières d’un montant de 5 375 091 143 FCFA représentent 2 ,79% des dépenses totales ». Il faut entendre, « seulement 2,79%). Vu ainsi évidemment la gravité est relativisée. Le montant peut paraitre astronomique, mais si on le rapproche au total global, c’est vraiment insignifiant. Sur un budget de 100 milliards, gérez bien 98 milliards et pour les 2 pauvres petits milliards restant « arrangez-vous », Ibriga ne vous en voudra pas. Bougouma, Kafando, Bertin Ouédraogo, Alain Traoré peuvent déjà demander à leur conseil de bien recourir aux calculettes et de faire les rapprochements indispensables pour savoir s’ils sont dans les clous des « seulement 2,79% ». Il n’est pas interdit les dépenses irrégulières et les dépenses non éligibles tant que ça reste dans « les 2,79% seulement ».
Enfin sur les parcelles. Il faut croire que c’était trop gros. L’ASCE-Lc n’avait le choix que de faire comme l’artiste camerounais : « sortir comme ça sortait ». Le rapport reconnait que les griefs étaient fondés. Il conclut là encore dans la logique « relativiste » qu’« aucun responsable d’osc » n’a été attributaire de parcelle. Sauf le sieur Fousséni Ouedraogo directeur exécutif de la Fondation de Zida. Alors question ? Une fondation relève-t-elle de la société civile ou pas ? Cependant à y regarder de près cette réserve de l’ASCE ne manque pas de sens. Fousséni Ouédraogo devenu directeur exécutif de la Fondation Zida a occupé les fonctions de conseiller auprès de Zida à la primature. Il a été aussi l’un des rares civiles à siéger au cabinet militaire de la Transition. En tout cas il avait son bureau contigu à celui de Théophile Nikiema.
Par le jeu de passe-passe il s’en sort avec près de 19 000 m2, sauf erreur de lecture bien évidemment, à Ouaga 2000. En supposant qu’il a payé le m2 à 40 000 f cfa, il lui a fallu débourser près de 760 millions de francs cfa. Le sieur Fousseni Ouédraogo, dont la fonction connue est conseiller à la primature, peut-il raisonnablement s’offrir un tel cadeau ? Il s’en trouvera quand même un burkinabè pour actionner la loi anticorruption qui est aussi celle du délit d’apparence. Surtout que l’intéressé a occupé une haute fonction durant l’année de transition.
Newton Ahmed Barry