Procès Maitre Kam/Opinion: le procès a opposé tout un système bâti autour des dealers de parcelles… à un journal(Opinion)

Attendu, le procès du 6 juin dernier l’était. Pour retrouver son honneur qu’il dit avoir perdu dans les colonnes de notre édition n°943, Me Guy Hervé Rommel KAM, Porte-parole du « Balai Citoyen », avocat chouchou de la Transition, nous a traîné devant le Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou pour lui demander de nous condamner à lui verser 25 000 000 FCFA.




Le verdict est connu de tous : une victoire à la Pyrrhus pour l’avocat qui récolte au passage 3,5 millions de FCFA et nous fait infliger 1 million de FCFA d’amande, là où le Procureur du MPP (Pardon du Faso) en réclamait trois, c’est-à-dire le maximum prévu par la loi !
La messe est-elle pour autant dite ? Rien n’est moins sûr tant ce procès a révélé l’ampleur du drame qui frappe notre pays et là où ça fait le plus mal, c’est-à-dire en sa Justice !

En effet, si nous partions sereins à ce procès, et nous l’avons plus d’une fois dit et rappelé parce que confiants en la solidité de nos arguments sur le plan professionnel et sur le plan juridique, nous étions tout de même loin de nous faire des illusions tant les intérêts étaient énormes et les acteurs en jeu fortement déterminés. Très rapidement ce procès a débordé de son cadre pour opposer tout un système bâti autour des dealers de parcelles et des bandits à col blanc qui ont pillé notre pays au cours de la Transition à un journal un peu trop outrecuidant à leurs yeux reléguant le plaignant au second plan et donc les accusations objets du procès en simple faire-valoir. Pouvait-il en être autrement dès lors que le ministre de la Justice lui-même était personnellement cité dans le texte querellé, tout comme l’ancien Premier ministre Isaac ZIDA et des responsables d’OSC dont l’ASCE-LC tient la liste secrète ? Déductions pour déduction, puisque c’est en se fondant sur des déductions que le plaignant s’est senti visé et que le Procureur du Faso s’est convaincu de notre culpabilité, au poing de nous traiter de délinquant avant même que le Tribunal ne tranche, ne peut-on pas en toute bonne logique dire que tout ce monde agissait dans l’ombre et était des donneurs d’ordre contre nous ?

Nous étions sereins et les débats nous ont conforté dans nos positions ; notre article a respecté toutes les règles déontologiques au point de pousser au ridicule la partie adverse qui, dans une vaine tentative de prouver le contraire, a tout au contraire apporté de l’eau à notre moulin. Sur le fond comme sur la forme, nous avons montré que nous n’avions rien à nous reprocher, même si on peut estimer que nous avons été quelque peu hardis en ce qui concerne le cas précis de Me KAM sur lequel nous n’avions pas tous les éléments.

Mais n’est-ce pas le propre du journalisme d’investigation que d’explorer des pistes et d’avancer souvent en terrain inconnu pour espérer des retours d’information utile et des réponses à des questionnements ?

Parce que la démarche professionnelle respectait les règles de l’art, les réponses juridiques aux accusations de diffamation et d’injure ont été claires et limpides. La dextérité de notre défense a obligé la parti adverse à rechercher l’affrontement à tout prix par des injures grossières tant à notre endroit qu’à celui de leurs homologues. Mais peine perdue. Même le représentant du Parquet qui a pris fait et cause pour elle s’est cru le devoir de tenir des propos incongrus comme s’il voulait montrer à tout prix son parti pris. Le plus pathétique, c’est que lui-même, à qui il incombe le plus d’établir la culpabilité qu’il a prononcé, a été incapable de le faire, se contentant de lieux communs et d’invectives.

Vraiment pathétique ! Même en mission, on aurait aimé voir au moins une parodie de droit ne serait-ce que pour éviter le ridicule et sauver les apparences.

Voilà pourquoi nous tirons notre chapeau au Tribunal. Même si nous contestons son verdict, qui nous paraît irréaliste nous comprenons parfaitement les contraintes qui étaient les siennes et saluons son courage ! Celui de n’avoir pas suivi la partie civile et le Parquet dans leur lynchage, leur acharnement et leurs arguments hors procès. Celui d’avoir aussi résisté aux énormes pressions venues tant de la salle que de l’extérieur et d’avoir tenté de couper la poire en deux. En effet dans l’impossibilité de prononcer notre relax du fait des pressions visibles et invisibles même si les faits n’étaient pas constitués au plan strict du droit, le Tribunal a néanmoins refusé de servir d’arme pour « assassiner » le journal. Il faut avouer que juger une affaire dans laquelle une OSC telle que le « Balai citoyen » avait des intérêts et a marqué sa présence dans la salle (avec ses chemises, pardon teeshirts noirs), après les menaces d’autres OSC de brûler le Palais de justice et de s’en prendre aux magistrats qui ne respectent pas « l’esprit de l’insurrection », n’est pas la chose la plus simple ; surtout lorsque son propre ministre est concerné au premier chef. A défaut de pouvoir dire le droit, le tribunal a refusé la responsabilité historique de tuer le journal. Dans notre contexte actuel de fascisation du pouvoir et dans cette affaire où tous les dealers de parcelles de la Transition ont fait cause commune, cela ne mérite-t-il pas une reconnaissance, même si le droit n’a pas été dit ? Autant nous protégeons nos sources, autant nous comprenons que d’autres veuillent se mettre à l’abri de représailles. Le temps travaille pour nous et tôt ou tard tout se saura ! Ce procès à d’ailleurs miraculeusement ouvert de nouvelles pistes d’investigation sur les pratiques frauduleuses de certains acquéreurs des terrains de la SONATUR.

Edito de l'opinion

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