Le principe de la concertation et du dialogue permanent est la base des rapports entre le gouvernement et les organisations syndicales. En rencontrant les structures syndicales samedi 25 février, le Premier ministre Paul Kaba Thiéba s’est montré ferme face aux manifestations d’humeur tous azimuts qui rythment la vie publique burkinabè. Cependant une telle attitude laisse perplexe quant à l’issue vers une trêve sociale, l’appel sera-t-il entendu ?
Le Premier ministre, Paul Kaba Thiéba n’est pas allé du dos de la cueillère pour dénoncer l’installation progressive au Burkina Faso d’une pratique de lutte qui se transforme de plus en plus en tradition. En effet, il relève que tous les points de revendication donnent lieu à des débrayages systématiques, souvent sans préavis, sous la forme de sit-in, boycott d’activités professionnelles spécifiques quand ce ne sont pas des grèves intempestives ou à répétition. En effet, tour à tour, les agents du Centre hospitalier et universitaire Yalgado Ouédraogo, du ministère des Finances, des postes de péage, ainsi que les routiers… ont alterné menaces et sit-in pour exiger ceci et cela, relève le premier ministre.
« Tout se passe comme si, les yeux fermés, certains travailleurs n’ont pas la moindre affection pour le bien commun et pour l’équilibre de l’Etat », déplore le chef du gouvernement. Pour lui, tous les moyens sont utilisés pour obliger l’Etat à accroitre les avantages même secondaires, au risque d’engager le pays dans une escale et un cycle sans fin. Cela le conduit à se questionner sur les motivations de cette agitation « frénétique et contagieuse ».
Les politiciens accusés d’utiliser les syndicats
« Ces acteurs politiques cherchent à déstabiliser l’Etat en instrumentalisant le monde syndical. Nous le savons. Nous sommes des enfants du Burkina, nous avons tous grandi ici. On se connait tous dans ce pays », a-t-il lancé. C’est alors qu’il demande à ceux qui veulent faire de la politique, de quitter le syndicalisme afin de rejoindre « l’arène politique ».
Pour Paul Kaba Thiéba, durant l’année écoulée, le gouvernement a essayé autant que possible d’apporter des réponses convenables aux préoccupations exprimées dans les ministères par les organisations. Cependant, il estime que la politique et la pratique de surenchère doivent être enrayées. « Nos marges de manœuvres sont limitées avec une masse salariale au dessus de 40% des ressources propres de l’Etat », a-t-il indiqué. A l’entendre, baisser les impôts en augmentant les charges ne peut que conduire à plomber tous les efforts de reconstruction de notre pays.
Egalement, consacrer la quasi-totalité des ressources publiques au fonctionnement de l’administration elle-même et à la solde des fonctionnaires s’apparenterait à une confiscation de l’effort du contribuable par ceux-là qui ont pour mission de la protéger. Pire, soutient-il, « ce serait aller à l’encontre de l’esprit de l’insurrection populaire qui signifie gouvernance vertueuse, attention aux plus faibles de la société, priorité à notre jeunesse.
Quid des systèmes de rémunération des agents de l’Etat ?
Par ailleurs, le gouvernement a invité les organisations syndicales à de meilleurs sentiments pour l’avenir du pays. « Nous devons sans plus tarder nous remettre autour de la table et s’il le faut, remettre à plat toutes les questions touchant aux systèmes de rémunération des agents de l’Etat », a expliqué le chef du gouvernement. C’est pourquoi, il recommande une trêve sociale pour accompagner cet effort de dialogue.
En face, les responsables syndicaux quant à eux, ne se sont nullement montrées démontées par les propos du Premier ministre. En effet, ils se sont donné un temps de réflexion pour consulter leurs bases, mais estiment que le gouvernement devrait avant toute chose balayer devant sa porte. Pour eux en effet, l’«introspection collective sur l’avenir du pays», souhaitée par le Premier ministre, devrait induire le respect des engagements pris.
On peut donc dire, à la suite de cette sortie de Paul Kaba Thiéba, qui met clairement l’option d’une trêve sociale sur la table du dialogue avec les partenaires, que les relations entre les deux parties prennent désormais une autre tournure. Les partenaires sociaux valideront-ils ce choix pour desserrer un instant cet étau qui semble étouffer l’action gouvernementale à pratiquement tous les niveaux? La question est posée.