Les victimes de Ben Ali parlent en public

Pour la première fois depuis le renversement du président Ben Ali en 2011, les victimes présumées de la répression menée par son régime seront auditionnées à partir de ce jeudi, devant les caméras et les micros de la télévision et de la radio nationales.

Pendant deux jours, une dizaine de personnes se plaignant de violations des droits de l'homme témoigneront en public.

Les auditions, qui seront relayées par la télévision et la radio nationales, sont une étape importante de la tâche confiée à l'Instance vérité et dignité (IVD), créée depuis deux ans pour enregistrer les plaintes des victimes des violations perpétrées par le régime de Ben Ali, de 1987 à 2011.

Quelque 65 000 plaintes ont été déposées auprès des services judiciaires tunisiens.

"Nous avons, pour le moment, effectué plus de 7 000 auditions à huis clos. Les auditions publiques offrent l'occasion de partager avec la société ces maux qui ont marqué son passé et ne doivent pas hypothéquer son avenir", a expliqué Sihem Bensedrine, la présidente de l'IVD.

"Si nous ne nous occupons pas de ces violences, elles risquent de survenir encore", a-t-elle averti.

"Complot"

Les victimes présumées de la répression menée par le régime de Ben Ali, y compris celles dont les biens auraient été volés par l'Etat, ont été recensées par l'IVD.

Mehdi, lui, déclare avoir été emprisonné pendant un an, en 2004. L'étudiant et militant des droits de l'homme avait été accusé de "complot" contre le régime de Ben Ali.

"J'ai été torturé pendant quatre heures de suite", se souvient-il.

Selon les témoignages recueillis par l'Instance vérité et dignité, les victimes étaient emprisonnées après des procès expéditifs, sur la base de la loi antiterroriste de l'époque.

L'avocat Mohamed Friaa affirme que ces procès étaient devenus quotidiens sous le régime de Ben Ali.

"Les juges condamnaient souvent les gens sur la base de procès-verbaux de police élaborés avec des témoignages extorqués aux prévenus par la torture", soutient Me Friaa.

Les auditions publiques sont très attendues par les Tunisiens.

Bon nombre d'entre eux, comme Omar, disent se souvenir encore des violences subies sous le régime de Ben Ali, cinq ans après le renversement du président réfugié à Djeddah (Arabie Saoudite).

"Tout le monde parlera. C'est un évènement…"

Ce jeudi soir, Omar sera avec sa famille devant son téléviseur pour suivre les auditions télévisées. "On n'aura pas la chance d'aller voir. Mais on suivra les audiences à la télévision. Tout le monde parlera. C'est un évènement…" affirme-t-il.

"C'est un tournant historique de l'histoire de la Tunisie, parce que nous avons tous été des victimes, soit par la corruption, soit par les menaces ou la brutalité de la police. Je suis très content qu'on décide d'entendre publiquement les victimes", commente un citoyen tunisien.

L'IVD espère qu'au terme de de son mandat, des procès seront tenus et les préjudices subis par les victimes réparés.

 

source:BBC

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