Société: Les Syndicats dénoncent la lenteur et les tergiversations dans le traitement du dossier des martyrs de l’insurrection populaire

 

Dans moins d’une semaine, le peuple burkinabè va commémorer le troisième anniversaire de l’insurrection populaire qui a contraint  Blaise COMPAORE à fuir le pays avec la complicité des autorités françaises.

Cette insurrection nourrie par les pratiques du pouvoir COMPAORE marquées par des crimes de sang et des crimes économiques impunis, par des atteintes graves aux libertés individuelles et collectives, la volonté de se maintenir au pouvoir, malgré ses limites, revêt un caractère historique pour le peuple burkinabè mais aussi pour les peuples de la sous-région, d’Afrique et du monde.

Les attentes nourries par les différentes couches populaires ont été trahies par le pouvoir de la transition mais aussi par le pouvoir actuel issu des élections de novembre 2015.

En ce troisième anniversaire de l’insurrection populaire l’Unité d’Action Syndicale (UAS) s’incline à nouveau sur la mémoire des martyrs. En souhaitant un prompt  rétablissement aux blessés et en exprimant sa profonde compassion à toutes les familles des martyrs, elle dénonce la lenteur et les tergiversations dans le traitement du dossier des martyrs de l’insurrection populaire et de la résistance au putsch de septembre 2015, de même que de tous les autres dossiers de crimes de sang et économiques.

A quelques jours de la commémoration des trois ans de l’insurrection populaire, l’UAS a voulu, par la présente conférence de presse, se prononcer sur un certain nombre de questions qui marquent l’actualité politique et sociale dans notre pays.

Nous évoquerons entre autres les questions suivantes :

  • La gouvernance politique, économique et sociale;
  • La vie chère ;
  • L’insécurité ;
  1. La gouvernance politique, économique et sociale

 

Le climat social est mis à mal par certaines pratiques liées à la gouvernance politique et économique, à l’absence d’un véritable dialogue franc. En effet, les populations font de plus en plus face à non-tenue de promesses électorales. Et pire elles constatent la poursuite du pillage du patrimoine national. Pour exemples :

Au niveau du Pouvoir exécutif :

 

A la présidence du Faso, après :

 

  • les nominations contestables dont celles d’anciens dignitaires plongés dans des malversations foncières;
  • l’annonce de la disparition de cinquante-sept (57) véhicules ;

Ce sont des malversations dans la gestion du carburant dans lesquelles la présidence trône à la tête.

Au niveau de plusieurs ministères, des cas de malversations financières exhumées par la presse viennent s’amonceler sur de multiples dossiers de crimes économiques non élucidés ; en plus des cas de gestion calamiteuse du patrimoine minier et celui foncier révélé par des commissions d’enquête parlementaire et j’en passe….. Le dernier rapport de l’ASCE/LC est un indicateur de plus que la même gymnastique de mal gouvernances se poursuit. Pour exemple, il ressort de ce rapport de l’AESC/LC que : « Malgré la recommandation de l’AESC/LC sur l’élaboration de textes sur la gestion du carburant et des lubrifiants, la Présidence du Faso et les ministères en charge des finances, de l’urbanisme et de la jeunesse n’en disposent toujours pas. » ;  en précisant davantage que les consommations irrégulières remontent à 250,558 millions de F CFA dont 98,13% proviennent de la Présidence du Faso.

Au niveau du Pouvoir législatif, après :

  • les tablettes qui ont défrayé la chronique,
  • la question de millions de fin de l’année,

c’est la parution du journal courrier confidentiel, n° 137 du 10 août 2017 qui a révélé une question de missions sans justificatifs et l’a titré : « Gestion du budget 2016 de l’Assemblée nationale: 235 missions à l’extérieur du Burkina…sans pièces justificatives » ; après avoir fait passer sa première dotation financière de 8 milliards f CFA à 14 milliards de F CFA.

Au niveau du Pouvoir Judiciaire, après :

  • une falsification grossière d’une décision de justice dans une haute Juridiction ;
  • l’annulation des mandats d’arrêts internationaux lancés contre Guillaume SORO, Président de l’Assemblée Nationale Ivoirienne et Blaise COMPAORE par la Cour de Cassation le jeudi 28 avril 2016, annoncé comme suit : « « Tous les mandats d’arrêt internationaux ont été annulés aujourd’hui par la Cour de cassation pour vice de forme. Ca concerne aussi bien le mandat d’arrêt contre Blaise Compaoré, celui contre Guillaume SORO et bien d’autres », a déclaré à l’AFP le procureur général de la Cour de cassation Armand Ouédraogo.
  • la découverte davantage d’un visage hideux de Juridictions aux ordres à travers les dispositions de la Haute Cour de Justice jugées inconstitutionnelles par le Conseil constitutionnel pendant le procès du dernier gouvernement TIAO.
  • des libérations tout azimut pour raison de santé, tout en mettant soigneusement certains Burkinabé qui méritent les mêmes droits de côté ; démontrant ainsi ici une fois de plus que l’égalité devant la loi tant exhibée n’est qu’un leurre.
  1. La vie chère 

 

Ce qui précède indique qu’il y a deux types du Burkina : celui dans lequel il y a l’abondance beurrée d’impunité ; et celui dans lequel manger à sa faim est jusque-là un rêve. En effet, il est incompréhensible que dans un pays où les gouvernants ont presque tous comme mots introductifs à leurs discours : insuffisance de ressources, appel au civisme et le respect de l’autorité de l’Etat, paix et développement durable etc. et l’exemplarité, de même que l’esprit de sacrifice sont les choses les plus rares dans le comportement de nos dirigeants à tous les niveaux.

Face à cette situation incompréhensible et inacceptable les populations et les travailleurs sont obligés de prendre leurs responsabilités pour se faire entendre ; même sur des questions qui dans un Etat de droit normal, un gouvernant patriote ne saurait attendre certaines revendications avant de donner l’impression qu’il bouge. Par exemple :

  • Les inspecteurs et contrôleurs du Travail, représentant la force publique dans le contrôle de conformité et sécurité dans les entreprises sont dans un dénuement total. Ce syndicat demande à l’Etat de déconcentrer l’inspection du travail dans tous les arrondissements afin qu’en cas de crise, les protagonistes n’aient pas à parcourir des distances insupportable pour chercher une solution à leur crise. Face au mutisme du gouvernement, leur Syndicat le SYNACIT a suspendu les conciliations depuis le mois d’août. Et donc beaucoup de crises sociales non résolues pèsent imprévisiblement sur le climat social.
  • Les enseignants recrutés sur mesures nouvelles, végètent pendant des mois sans salaires, dans une tâche sociale très contraignante qu’est l’éducation des enfants. En plus la Coordination des Syndicats de l’Education font face à une remise en cause d’engagements pris par les Autorités, ce qui les oblige à engager un préavis de grève pour les 26 et 27 octobre 2017.
  • Les travailleurs de l’Hôtel SOPATEL SILMANDE ont fait face à une crise déclenchée depuis plus de cinq mois. Malgré que l’UAS ait intervenu dans cette crise où le gouvernement a joué à la limite le garçon de course du patronat ; malgré que l’opinion ait été prise à témoins sur la reprise des travailleurs dans cet Hôtel, nous sommes mis devant le fait accomplit de contrat de travail à contenu inhumain servi aux travailleurs.
  • Les Travailleurs des Ex-garderies populaires qui, après des dizaines d’années de service rendu à la Nation, font face depuis plus d’une dizaine d’années à des Autorités qui semblent ignorer le sens du devoir.
  • Les travailleurs de la Société des Mines du Burkina (SMB), depuis plus de cinq mois après que l’employeur ait décidé unilatéralement de fermer l’usine et de mettre les travailleurs en chômage technique de façon illégale, ne savent aujourd’hui à quel saint se vouer.
  1. L’insécurité 

 

L’insécurité grandissante dans notre pays tire ses origines dans les collaborations incestueuses entre le régime Blaise COMPAORE, auquel ont appartenu les ténors du régime actuel en tant que piliers et vrais architectes. Ce ne sont pas les déclarations d’intention ou la multiplication des fora qui pourraient trouver les réponses efficaces et efficiente face à cette insécurité grandissante. Mais plutôt, la moralisation de nos Forces de Défense et de Sécurité (FDS) à travers une gouvernance vertueuse et transparente, l’exemplarité de la hiérarchie etc.

Par ailleurs, l’autre source de l’insécurité est le contenu des lois et règlements qui sont souvent taillés sur mesures, et aussi le non-respect du minimum de leur contenu qui paraitrait exact, et une justice qui n’est donc véritablement au service de notre peuple. Pour preuve, le gouvernement, le patronat ne peuvent dirent qu’il faut la paix pour le décollage économique et à contrario ils travaillent à faire voter des normes de travail contraire aux conventions internationales ratifiées, des normes de travail qui renforce l’exploitation esclavagiste du travailleur voire sa clochardisation etc. Une société d’injustice est une société qui se construit un avenir incertain ; donc cela doit être fermement combattue et sans état d’âme ! Aux autorités, l’Unité d’Action Syndicale (UAS) rappelle que les mêmes choses produisent les mêmes effets. Du reste, en répondant à une question sur la gouvernance actuelle, un dignitaire du système vient de déclarer dans les Editions le Pays N°6457 du mardi 24 octobre 2017 que : «  A défaut de résultats immédiats, il faudrait au moins éviter de répéter les pratiques et les erreurs qui nous ont naguère menés où on sait : à l’insurrection populaire de 2014. Or, certaines des pratiques décriées alors, continuent, parfois même pire.

A défaut de rectifier le tir à temps, on pourrait bien se retrouver avec une nouvelle révolution. Et elle sera dure.».

Le comportement de nos dirigeants et de ceux avec lesquels ils étaient autour de la même soupe hier (arrogance et suffisance), nous interpellent à une mobilisation exemplaire et une solidarité sans faille pour la défense, la protection et la promotion des acquis de l’insurrection populaire et de la résistance au putsch de septembre 2015. En effet, le manque affiché de volonté politique d’élucider les crimes économiques et de sang, les tergiversations et manipulations sur certaines décisions de justices jusqu’à des non-lieux et où d’annulations de mandats d’arrêts, les gesticulations sociales en faveur de retour de réfugiés politiques sans mettre sans la moindre attention à la douleur toujours atroce des familles de martyrs et des blessés, la gestion fantaisiste de certaines demandes d’organisations de la Société Civile aboutissant à des bouclages sécuritaires de certaines zones avec des arrestations et incarcérations, nous interpellent à analyser avec minutie et esprit de suite toutes ces manœuvres politiciennes. Elles sont orchestrées en vue d’aboutir à un retour d’une éventuelle restauration de zones rouges et intensifier les atteintes aux droits humains. Ces pratiques sont fermement condamnables d’où qu’elles viennent.

Mesdames et messieurs les journalistes,

Nous sommes de toute évidence dans un contexte difficile, marqué par la remise en cause des acquis de l’insurrection populaire et de la résistance victorieuse au coup d’Etat. Et face à une telle situation pleine de tous les dangers, l’Unité d’Action Syndicale (UAS) se sent interpellée. Dans ce sens, elle appelle l’ensemble des travailleurs et travailleuses de notre pays à se démarquer dans la solidarité de toute tentative de culture de germe de guerre civile dans notre pays. Tout en mettant en garde les autorités contre toute velléité de remise en cause des libertés, notamment celle de réunion et de manifestation sur la voie publique, elle invite les travailleuses et les travailleurs à s’impliquer dans les luttes visant à exiger une suite aux nombreuses attentes populaires relatives à la justice, aux libertés, à plus de justice sociale, à l’accès aux services sociaux de base notamment l’éducation et la santé.

Pour faire face au mieux à cette situation intenable, il faut de la solidarité, le renforcement de nos organisations respectives, de la mobilisation, de la vigilance, de l’engagement et de la détermination. Donc, l’UAS soutient toutes les luttes des populations et des travailleurs pour un mieux-être, notamment :

  • du mot d’ordre de grève lancé par la coordination des syndicats de l’éducation qui compte près de 17 syndicats pour les 26 et 27 octobre 2017 sur l’ensemble du territoire en vue d’exiger un meilleur traitement du système éducatif et pour la revalorisation de la fonction enseignante ;
  • la résolution de la plateforme du syndicat des Inspecteurs et Contrôleurs du Travail ;
  • la lutte du Syndicat National des Secrétaires du Burkina ;
  • la lutte du Syndicat des Travailleurs de l’Action Sociale (SYNTAS) ;
  • la lutte des travailleurs de SMB pour une solution acceptable à leur situation ;
  • le respect des accords avec les travailleurs de l’Hôtel SOPATEL SILMANDE ;

Sur cette situation nationale la position de l’Unité d’Action Syndicale (UAS) est connue et est : Vérité et Justice ; la réconciliation étant une conséquence des deux. Cette position a été réaffirmée à la rencontre avec le Chef de File de l’Opposition, Monsieur Zéphirin DIABRE le 27 avril 2016 à la Bourse du Travail ; Aussi réaffirmée le 21 février 2017 à la délégation de la CODER conduite par son 1er vice-président, Rasmané OUEDRAOGO, à la même Bourse du Travail ; et au Gouvernement le 3 mars 2017. En tirant leçons de tous les tournants décisifs de l’histoire de notre pays et les conséquences qui en découlent, cette position de l’UAS n’est pas négociable et elle l’assume pleinement. Elle s’opposera donc avec vigueur à tout marchandage macabre et autres calculs politiciens d’où qu’ils viennent sur la dignité, l’intégrité et la liberté des burkinabé. Elle prend l’engagement à poursuivre son travail de défense des acquis de l’insurrection populaire et de la résistance dans la vigilance, la sérénité et la fermeté.

Elle invite par conséquent les militants et militantes, les sympathisants et sympathisantes, à se mobiliser et prendre part sur l’ensemble du territoire national à toutes les manifestations organisées contre l’impunité, donc à la marche-meeting contre l’impunité   prévu le 4 novembre 2017 à la place de la Nation à Ouagadougou. 

Ce sont là, mesdames et messieurs les journalistes, quelques éléments de la situation nationale sur lesquels l’UAS a décidé de se prononcer.

A présent, nous nous mettons à votre disposition pour apporter des précisions sur ces points et éventuellement évoquer d’autres questions.

Je vous remercie !

Bassolma BAZIE

Secrétaire Général Confédéral de la CGT-B

Président De Mois des Centrales Syndicales

Porte-Parole de l’Unité d’Action Syndicale (UAS)

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