A travers cet écrit, le juriste Abdoul Karim Sango s’insurge contre ce qu’il appelle un précédent juridique gravissime dont se serait rendu coupable le chef de cabinet de la présidence du Faso. Il s’agirait de la nomination, par arrêté, d’un suppléant à la présidence du Conseil supérieur de la communication(CSC).
C’est l’activiste Lengha fils qui nous l’a appris ce matin sur sa page Facebook. Le directeur de cabinet du président du Faso, le tout nouveau docteur en droit Seydou Zagré, a osé prendre, sous délégation du président du Faso, un arrêté de nomination d’un suppléant au poste de président du Conseil supérieur de la communication.
C’est vrai que le bruit a couru ces derniers jours. Cet arrêté est simplement une monstruosité juridique, en ce qu’il est nul et de nul effet. L’État de droit oblige les gouvernants à prendre des décisions sur une base légale. C’est ce que nous enseignons aux étudiants. Et cet arrêté n’en a aucune et ne peut produire aucun effet sauf à placer l’institution dans une insécurité juridique extrêmement grave. Pourquoi ?
Primo, la notion de suppléant n’existe nulle part dans la loi organique portant organisation du CSC. Il n’existe pas de suppléant à la fonction de président ou de membre du CSC. Aussi puissant qu’il puisse l’être, le directeur de cabinet ne peut en créer ex nihilo. Même le président n’est pas habilité à en créer. Ensuite, le CSC est une institution indépendante jouissant de l’autonomie administrative et c’est là une caractéristique fondamentale de ce type d’institution.
Un arrêté de la présidence du Faso ne pourrait aucunement interférer dans l’organisation et le fonctionnement de cette institution. Les arrêtés de la présidence du Faso ne peuvent prévaloir que pour l’organisation et le fonctionnement de cette institution sauf si un texte de portée supérieure prévoit autre chose. Ce que le tout nouveau docteur en droit vient de faire est un précédent gravissime, il a inventé un texte pour apporter une solution à un problème que la loi sur le CSC a déjà réglé.
En effet, en cas de vacance de pouvoir, l’on doit procéder au remplacement du membre empêché. La présidente étant en prison, le président du Faso a le droit de nommer un nouveau membre et de faire procéder à l’élection d’un nouveau président dont la nomination se fait par décret. Les membres du CSC ne disposent pas d’un mandat irrévocable contrairement aux pratiques dans ce type d’institution. La seule option qui était envisageable ici c’était de faire assurer un intérim.
Mais l’intérim est limité dans le temps même si notre pratique administrative révèle des cas d’intérim permanent. Monsieur le directeur de Cabinet, votre arrêté rentre dans la catégorie des actes administratifs inexistants et devrait servir de modèle en TD de droit administratif aux étudiants de deuxième année. C’est peut-être là son unique intérêt.
Le chef de l’État, garant de l’État de droit, devrait purement et simplement l’annuler avant qu’un étudiant de première année de droit n’en demande l’annulation au juge administratif. Et il n’aura pas besoin de beaucoup d’arguments pour l’obtenir.
Ainsi va la vie des nations, les grandes révolutions peuvent se terminer dans une grosse déception ! Quand on réalise que le rêve pour lequel on s’est résolument battu a été trahi ! En ce jour, je voudrais rendre un hommage sincère à nos martyrs assassinés pour la défense d’ une société burkinabé plus libre, démocratique et juste pour tout le monde. Prompt rétablissement aux blessé !
Oui ils sont morts pour un pays où la justice est la même pour tout le monde sans aucune forme de discrimination. Un Burkina où plus personne ne devrait abuser des ressources de l’État par la corruption. Un Burkina fondé sur les valeurs que sont notamment l’amour de la patrie, l’intégrité, la tolérance, le pardon sincère, la solidarité, l’amour du travail bien fait, le respect des anciens...
Mais, la conjoncture nationale ne doit pas nous faire perdre de vue tous les progrès réalisés dans ce pays depuis l’insurrection. Même si avec le recul de l’histoire, je reconnais que la transition n’a pas été a la hauteur des attentes de notre peuple. La transition a été parasitée par de nouveaux acteurs opportunistes étrangers à la longue lutte de notre peuple pour la démocratie et la liberté. Des gens qui 24 heures avant l’insurrection buvaient encore le champagne avec le régime Compaore. En tant qu’acteurs, j’assume entièrement ma part de responsabilité et je demande pardon.
Nous avons assassiné l’espoir d’un peuple !
Les historiens, les vrais reviendront sur ce qui s’est réellement passé sous la transition. Le plus grand mérite de la transition est sans conteste d’avoir réussi à organiser les élections dans un contexte très difficile. Et n’en déplaisent à certaines personnes, jamais notre pays n’avait organisé une élection aussi transparente depuis le renouveau démocratique . Pour avoir été membre de la CENI, je puis vous dire que c’est un véritable exploit que d’avoir pu organiser ces élections. Des individus ont tout fait pour prolonger cette transition, heureusement la CENI et notre peuple s’y sont opposés.
Aujourd’hui, nous sommes un peuple d’hommes libres et cette liberté nous l’avons conquise. Notre révolution rejoint celle des autres grandes nations parmi lesquelles on peut citer les Etats Unis, la France. Notre révolution inspire beaucoup d’autres peuples et est citée comme un modèle à travers le monde. Soyons en fiers ! La jeunesse en particulier, qui a souvent le sentiment d’avoir été abusée dans cette entreprise titanesque doit garder son rêve intact et être fière de ce qu’elle a réalisé.
Une jeunesse capable de réaliser une insurrection et faire échec à un coup d’État, c’est un potentiel extraordinaire de capacités qui attend d’être bien utilisé pour développer notre nation. Nous sommes toujours à la recherche du bon leadership pour transformer les rêves du peuple en réalité. En ce jour, où nous commemorons les trois ans de l’insurrection, je voudrais interpeller tous les acteurs influents de l’espace public à une plus grande responsabilité dans l’action publique. Ils doivent toujours se souvenir de ces jeunes martyrs enterrés au cimetière de Gounghin lorsqu’ils agissent.
Ces martyrs sont-ils fiers de nos agissements quand l’intérêt individuel prime sur l’intérêt général ? Il ne faut pas se tromper, tous ceux qui auront trahi la cause des martyrs le paieront sur terre ! Dieu sauve notre peuple et notre nation !