Burkina: le Syndicat des impôts écrit au maire et explique pourquoi sa marche du 30 Mars n’as pas eu lieu




Le Syndicat national des agents des impôts et des domaines (SNAID) dans une lettre réagit sur sa demande d’autorisation de manifester à Ouagadougou.

Monsieur le Maire,

Par lettre N°2017-013/CGT-B/SNAID/BN du 24 mars 2017, le Bureau National du Syndicat National des Agents des Impôts et des Domaines vous informait de l’organisation d’une marche de protestation le jeudi 30 mars 2017 pour transmettre un message au Premier Ministre.

En réponse, dans une première correspondance N°2017-708/CO/M/SG/DAG/SAA du 29 mars 2017, vous accusiez réception tout en prenant acte de l’organisation de la marche conformément aux dispositions en vigueur.

Puis, dans une seconde correspondance n°2017-710/CO/SG du 29 mars 2017, vous aviez fait une reculade en annulant « l’autorisation » de la marche au motif que nous n’avions pas entrepris toutes les démarches nécessaires pour informer au préalable l’autorité destinataire de notre message. En une même journée, vous avez signé deux notes contradictoires (en moins de trois  heures d’intervalle !).

Monsieur le Maire,

Votre interdiction de la marche appelle un certain nombre d’observations :

  • Des faits

Dans l’optique de la tenue de la marche, le  Premier Ministre a été ampliataire de  la lettre N°2017-013/CGT-B/SNAID/BN du 24 mars 2017 portant organisation de la marche qui vous a été adressée. De surcroit, par lettre N°2017-011/CGT-B/SNAID/BN du 23 mars 2017 portant préavis de sit-in adressé au Premier Ministre il a été clairement mentionné que « des marches seront organisées à Ouagadougou et à Bobo-Dioulasso le jeudi 30 mars 2017. A Ouagadougou, la marche partira de la Bourse du travail jusqu’au Premier Ministère  le jeudi 30 mars 2017 à partir de 08 heures 30 minutes. A cette occasion une lettre de protestation vous sera transmise pour dénoncer l’absence de volonté du gouvernement à apporter des solutions satisfaisantes aux problèmes des travailleurs des impôts ». Ces lettres ont été transmises dans les délais et formes requis par les textes en la matière.

  • Du respect des textes

Des faits sus décrits, le SNAID a respecté toutes les conditions requises par les textes réglementant l’organisation d’une marche. C’est ce qui vous a valu à prendre acte de notre projet de marche à travers votre première correspondance. Par conséquent, le motif que vous avez invoqué pour interdire notre marche n’a aucune base légale et relève d’une triste imagination dans la mesure où vous étiez bien informé que le Premier ministre a été mis au courant du programme de notre marche. Quelle est la disposition légale portant liberté de réunion et de manifestation sur la voie publique qui oblige l’information préalable de l’autorité destinataire de message ? Votre décision d’interdiction, prise sur la base d’un mensonge grossier, n’est ni moins ni plus qu’un abus de pouvoir ! Ceci s’avère plus vrai dans la mesure où le Maire de Bobo-Dioulasso a « autorisé » la marche dans sa commune alors que ce sont les mêmes démarches qui ont été entreprises là-bas comme à Ouagadougou !

Nous sommes donc fondés de qualifier votre décision d’interdiction comme une violation grave, flagrante et inadmissible des libertés démocratiques et syndicales ! C’est une décision inique dont les objectifs sont facilement saisissables.

  • De l’objectif de votre interdiction

Vous aviez interdit notre marche lorsque vous vous êtes rendu compte du grand engouement des travailleurs des impôts pour l’activité en particulier et en générale leur mobilisation sans faille dans la lutte qui était en cours. Votre interdiction visait donc à faire échouer notre noble lutte en nous tendant un piège pour préparer une répression sur les travailleurs des impôts afin de liquider notre syndicat. Le SNAID, clairvoyant, a su esquiver votre piège à travers l’attitude adoptée.

  • De l’attitude du SNAID

Le Bureau National du SNAID tout en relevant le caractère illégal et rétrograde de votre décision a appelé les travailleurs des impôts à surseoir à la marche à Ouagadougou pour ne pas céder à votre provocation. Dans la même logique, il a demandé aux travailleurs à Bobo-Dioulasso de surseoir à la marche dans cette commune pour protester contre la violation des libertés démocratiques et syndicales. Une attitude du SNAID qui montre une fois de plus la posture de syndicat responsable qu’il a toujours été. En rappel, en décembre 2016, lors des attaques terroristes contre les forces de sécurité à Nassoumbou, le SNAID n’avait pas eu besoin d’une quelconque demande administrative pour suspendre son mot d’ordre de grève afin de solidariser avec le peuple endeuillé. L’ensemble de ces attitudes responsables couplées à la détermination des travailleurs nous ont permis heureusement de parvenir à un protocole d’accord avec le Gouvernement sur nos points de revendication en dépit de votre position anti-travailleur des impôts !

Toutefois, notre position ne saurait  être considérée comme une faiblesse ou une caution de notre part des menaces que vous faites peser sur les libertés démocratiques dans la Commune de Ouagadougou.

  • Des libertés en danger dans la commune de Ouagadougou

Les libertés démocratiques et syndicales dans notre pays ont été acquises au prix de la sueur et du sang. Ce sont ces libertés démocratiques qui ont permis au Peuple Burkinabè de réussir en premier lieu son Insurrection d’octobre 2014 et dans un second temps sa résistance contre le putsch de septembre 2015. C’est dire donc que vous êtes arrivé à la tête de la Commune grâce à ces libertés démocratiques. Il est par conséquent incompréhensible et inconcevable que vous vous érigiez en bourreau de ces libertés. Nous osons croire que vous n’allez pas emprunter les mauvaises pistes du régime défunt qui avait institué des « zones dites rouges » et la loi soit disant anti-casses pour briser le mouvement démocratique.

Monsieur le Maire,

C’est aussi le lieu de vous rappeler les efforts et sacrifices innombrables des travailleurs des impôts pour la mobilisation des recettes communales qui s’élèvent à plus de 24 milliards en 2017 en sus des recouvrements des recettes du budget de l’Etat qui est de 720 milliards dont une partie revient aussi à la Commune sous diverses formes. Ainsi, si les communes ne peuvent pas accompagner les services des impôts dans le recouvrement optimal des recettes, il serait suicidaire pour elles de se constituer en obstacles comme vous venez de le faire en voulant saper une lutte légitime des travailleurs des impôts qui ne demandaient que le minimum afin de pouvoir améliorer leurs performances !

Monsieur le Maire,

Par la présente, le SNAID condamne fermement vos actes anti-syndicaux, liberticides et anti-démocratiques ci-dessus décrits. Il vous invite à un respect des libertés démocratiques dans la Commune de Ouagadougou.

Veuillez agréer, Monsieur le Maire, l’expression de notre ferme détermination à nous battre pour de meilleures conditions de vie et de travail des agents mais aussi pour la sauvegarde et l’élargissement des espaces de libertés démocratiques et syndicales.

Nongo Grégoire TRAORE

Secrétaire général

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