"Les américains rapatrient les éléments du Corps de la paix du Burkina Faso, pourtant assermentés dans le sacrifice pour le bien social des populations qu’ils servent dans des conditions les plus difficiles et dans des localités les éloignées. Si les américains en arrivent à une telle décision, il faut se convaincre que la situation sécuritaire présente ou à venir est préoccupante.
QUE FAUT-IL FAIRE EXCELLENCE?
J’ai personnellement été de ceux qui ont toujours dit que la sécurité des burkinabé ne devrait pas être dirigée politiquement. Mais hélas! Des gens ont compris que j’étais contre les civils qui dirigent les départements de la sécurité et de la défense. Cela n’a jamais été mon intention. Je n’ai jamais partagé la façon dont notre sécurité et notre défense sont gouvernées.
Excellence Monsieur le Président, le 30 décembre 2016 face à des journalistes, vous aviez affirmé officiellement qu’il n’y aurait pas de militaires dans un gouvernement sous son mandat.
Excellence, le contexte a dangereusement changé. Toutes les stratégies doivent être revues. Il faut donc changer de discours et s’y adapter. Les burkinabé ne sont plus en sécurité. Tous ceux qui ont dirigé ces départements ont tous échoué. C’est pourquoi, Excellence, je vous demande de revenir sur votre refus d’accepter l’entrée de militaires ou de tout autre professionnel de la sécurité ou de la défense dans votre gouvernement.
Excellence, permettez-moi de vous faire ce rappel historique en matière de stratégie militaire et de défense sous le règne de votre devancier, le Président Compaoré.
Au temps fort de la guerre en Côte d’ivoire, lorsque le Président Laurent Gbagbo menaçait de faire descendre le feu sur la tête de ses voisins ennemis, le Président Compaoré avait alors nommé le General Kouamé Lougué Ministre de la défense. A cette époque, le Colonel de Gendarmerie Djibril Bassolé était Ministre de la Sécurité.
Selon beaucoup de militaires et d’observateurs de l’époque, le General Lougué était l’homme qui inspirait le commandement et le respect au sein de la grande muette. Aussitôt nommé, le General Lougué, vêtu d’une tenue de guerre et à bord d’un hélicoptère de l’armée, entreprit une tournée en commençant par la frontière sud avec la Cote d’ivoire.
La stratégie du General Lougué était de remonter en bloc le moral des troupes stationnées dans cette frontière. Le succès était total. Celui qui voulait nous arroser s’est calmé et la tension retomba. Nos forces au niveau de cette partie du territoire était gonflé en bloc. Une confidence en conseil des ministres à l’époque, disait que l’armée burkinabé voulait courte et courte entrer en Côte d’ivoire pour faire regretter Laurent ivoirien de ses dires. Et Blaise Compaoré de dire ceci : il ne faut pas bruler la maison pour tuer un cafard.
Excellence, voilà un petit rappel d’histoire qui impose le changement de stratégie dans cette guerre contre notre peuple et notre armée. Je suis d’avis que la situation actuelle n’est pas une guerre conventionnelle mais elle impose tout de même un changement de fusil d’épaule. Le moral des FDS est au bas niveau. La fuite des policiers devant le café Aziz Istanbul est un exemple parlant. Il faut aux troupes, une personne capable de leur tenir le discours et de leur montrer la direction de la cible.
Dans un plan stratégique, quand le contexte d’environnement changé, il faut adapter la stratégie. C’est le principe clé de la réussite d’une stratégie.
Le commandement a des difficultés à s’imposer. Il y a des guerres inutiles de chefs et de corps. Les militaires ne veulent pas sentir les gendarmes. Les gendarmes ne veulent pas non plus sentir les policiers. Les Policiers ne veulent sentir les CRS. Finalement, il n’y a aucun partage de renseignement entre les corps. Chacun cherche à nuire à l’autre pour occuper le vide laissé par la dissolution du RSP.
Excellence, votre propre sécurité composée de tous les corps vit exactement ce problème de leadership et d’unité. C’est juste le reflet de ce que vit le reste des FDS. Rien ne va.
C’est pourquoi, il me semble opportun d’opérer le changement qui impose la cohésion et l’unité d’action de toutes les FDS. Il faut confier la sécurité et la défense aux professionnels qui inspirent respects et compétences dans les corps respectifs avec un résultat à atteindre dans un délai précis.
Enfin, il faut revoir le fonctionnement du renseignement. N’importe qui peut apporter des renseignements. Et le renseignement doit tenir compte des spécificités de chaque région. Paradoxalement, c’est au Sahel qu’on peut réussir le meilleur renseignement. Parce que là-bas, l’organisation sociale est tellement structurée qu’aucun étranger ne peut s’y infiltrer sans être détecté aussi rapidement. Le renseignement disait un ancien agent de la CIA, c’est comme le caméléon; il doit pouvoir prendre la couleur du lieu où il est implanté.
Si on ne fait rien de significatif, Excellence, les amis du Burkina Faso quitteront le pays. Le Burkina Faso sera une base importante pour le terrorisme.
De toutes les façons, Excellence, vous devez vous imposer ce pari. Si vous laissez en l’état les choses, la situation ira toujours en pire. Si vous changez et que cela n’apporte rien, vous n’auriez pas perdu car vous auriez essayé. On notera au moins votre volonté. C’est ne rien essayer qui serait le suicide. Donc essayez."
Lengha Fils
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