Pour les avocats de Blé Goudé, Fatou Bensouda et son équipe ont créé un « monde imaginaire » dans lequel leur client apparait comme un « démon ». Aussi, ont-ils essayé de démontrer le contraire aujourd’hui.*
Charles Blé Goudé est un homme de paix et son équipe de défense en apportera la preuve tout au long du procès. C’est, en résumé, le leitmotiv de la défense de l’ancien ministre de Laurent Gbagbo lors sa déclaration liminaire ce mardi. Une déclaration marquée par le discours de l'accusé qui a voulu renvoyer à la Cour une image de militant pour la paix.
« Que ce monde est injuste ! »
« Ce que vous venez de voir, c’était le chef de la rébellion, que j’ai emmené chez la maman du président Gbagbo (…). Chez nous, c’est signe de réconciliation », explique Charles Blé Goudé après la diffusion d’une vidéo datant de 2007, lors d’une tournée pour la paix qu’il avait organisée en compagnie de Guillaume Soro.
Il utilise plusieurs vidéos pour montrer sa culture de la paix et attester de ses initiatives. Dans l’une d’entre elles, on le voit aux côtés de victimes d’atrocités. Une vieille femme, amputée après avoir choisi entre son bébé et son bras ou encore une jeune fille, handicapée et se déplaçant à l’aide d’une brouette. Parlant de cette dernière, Blé Goudé affiche son incompréhension face aux accusations : « Je lui ai apporté assistance, moi le criminel que le procureur tente de présenter. »
« Faire un tel travail et après être traîné devant les tribunaux pour répondre de crimes contre l’humanité, vraiment Monsieur le président, je n’exagère pas quand je dis (…) que ce monde est injuste ! » affirme le prévenu vers la fin d’un discours d’une trentaine de minutes. Avant lui, ses avocats avaient déjà fait une présentation visant à déconstruire point par point la thèse de la procureure.
Blé Goudé luttait contre la violence
L’un de ces points soulevés par Alexander Knoops, l’avocat principal de l’accusé, est que son client n’a pas incité les jeunes à la violence, mais a plutôt entrepris des actions pour mettre fin à cette dernière. D’ailleurs, précise la défense à plusieurs reprises, preuves audiovisuelles à l’appui, Blé Goudé ne veut pas de « la guerre civile » ni d’un« Rwanda bis » en Côte d’Ivoire.
Selon l’avocat néerlandais, c’est « pour éviter aux jeunes de s’armer eux-mêmes » et« réduire la violence » que Blé Goudé a demandé à la jeunesse de s’engager dans l’armée. L’avocat insistera sur le fait que cette pratique est autant légitime que légale, surtout dans un contexte d’hostilités. Il ajoutera en outre que Charles Blé Goudé n’a, personnellement, « jamais dirigé un groupe de personnes armées ».
Absence de lien avec les jeunesses pro-Gbagbo
Aussi, la défense assure que Charles Blé Goudé n’avait pas l’influence suffisante pour contrôler l’ensemble des groupes de jeunes que la procureure prétend qu’il contrôlait. La défense affirme qu'elle démontrera, au cours du procès, que les groupes de jeunes présentés par l'accusation comme étant sous l’autorité de Blé Goudé sont en fait des groupes hétérogènes, instables et en proie aux luttes de pouvoir. « Ces groupes n’acceptaient pas l’autorité de Blé Goudé », précise Alexander Knoops, pour qui il ne pouvait pas, par conséquent, « y avoir un général de la rue ». L’avocat ajoute que Blé Goudé a été lui-même la victime d’une tentative d’assassinat d’un des leaders d’un groupe prétendument sous son contrôle.
Charles Blé Goudé veut retourner chez lui
« Blé Goudé est un homme de paix », martèle la défense. Pour preuve, elle montre un extrait de la rencontre de Blé Goudé avec M. Young-Ji Choi, ancien représentant des Nations Unies en Côte d’Ivoire, quelques temps avant les élections. « Il (M. Choi) a exactement les mêmes inquiétudes que nous », estime Blé Goudé face à la presse qui estimait, à l’époque que la tenue d’élections dans un contexte de montée des violences est difficile.
Prenant la parole, Me Claver N’Dry estime qu’en définitive « le procureur a de nombreuses pièces, mais l’accusation n’a pas de preuves » qui viendraient corroborer les charges à l’encontre de son client. « S’il y a eu un plan commun, c’est le plan commun du M. Ouattara », affirme-t-il.
Finalement, Charles Blé Goudé, lance un appel aux Ivoiriens : « J’appelle à la réconciliation dans mon pays, j’appelle à une paix sincère et durable dénuée de tout calcul politique ». Il conclut : « Je veux rentrer dans mon pays pour poursuivre mes champs de réconciliation que j’ai laissés en friches ».
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