L’Union pour le Progrès et le Changement (UPC) est un parti politique dont le souci permanent est d’œuvrer aux côtés des populations pour le développement (économique et social) durable du Burkina Faso. Ce souci l’amène, chaque fois que les intérêts des populations sont menacés, à se prononcer pour les rétablir dans leurs droits. C’est ce qui motive la présente déclaration sur la situation de crise qui prévaut à la CAMEG.
Dans un pays comme le Burkina Faso où les principaux indicateurs de mortalité et de morbidité sont parmi les plus alarmants dans le monde, on comprend aisément le rôle central que joue le médicament dans l’atteinte des objectifs de développement durable dans le secteur de la Santé. Or, au moment où le gouvernement devrait s’appliquer à mettre en place des stratégies pour améliorer la politique du médicament, c’est avec stupeur que nous assistons à l’imbroglio politico-judiciaire qui oppose le Ministère de la Santé à la CAMEG.
Ce qu’il convient d’appeler une crise s’est déclenchée en toile de fond des faits et considérations suivantes :
Depuis sa création, la CAMEG a connu plusieurs évolutions dans sa forme juridique. Elle a été érigée en 1998 en Association sans but lucratif (ASBL) à l’issu des recommandations des évaluations successives qui avaient permis de relever des lourdeurs et des conflits d’intérêt dans sa gestion. Elle a donc été conçue à l’antipode des sociétés d’Etat.
Cette forme juridique dite « hybride » réunit les représentants de plusieurs ministères, mais aussi des Organisations de la Société Civile (OSC) comme la Ligue des consommateurs, de même que des organisations internationales. Elle autorise la majorité des membres du Conseil d’Administration (CA) et non l’assemblée générale comme il est de coutume à prendre des décisions pour la vie et le fonctionnement de la structure. Il en est de même pour la signature et le renouvellement du mandat du Directeur Général.
Le représentant du Ministère de tutelle, celui de la santé, est généralement élu Président du Conseil d’Administration (règle non écrite). Cependant, ni lui, ni le Ministre de la Santé ne peuvent prendre des décisions unilatérales. Nonobstant cette règle, l’Etat a, à plusieurs reprises violé ces dispositions (cas des anciens DG qui ont été dédommagés à hauteur de millions) et s’apprête à le faire une fois de plus sur le dos des contribuables Burkinabè.
La CAMEG représente un exemple de réussite en Afrique et beaucoup de pays viennent s’inspirer de son expérience.
Cette forme juridique est aujourd’hui décriée par le Ministère de la Santé qui a pourtant été acteur de son maintien en l’état lors d’un atelier de relecture des textes organisé à Loumbila les 22, 23 et 24 janvier 2015. Les motivations qui avaient prévalu à ce choix étaient qu’elle était celle qui répondait le mieux aux exigences d’efficacité et d’autonomie de la CAMEG, gages de l’atteinte des objectifs qui lui étaient fixés. Un atelier de validation des nouveaux textes proposés par un comité restreint s’est tenu le 11 Mai 2015 à l’Hôtel Pacific. Le Ministère de la Santé de même que les autres membres y ont participé.
Un conflit ouvert est né entre Monsieur le Ministre de la Santé et la CAMEG (PCA, DG) suite au renouvellement du mandat du DG actuel par le CA pour une durée de 3 ans. L’argument évoqué par le Ministère de la Santé repose sur le fait que ce point a été évoqué en divers. Un autre CA convoqué par le PCA sur instigation du ministre avec cette fois-ci le renouvellement du mandat du DG à l’ordre du jour, aboutit aux mêmes conclusions : le maintien de sa confiance à l’actuel DG. Nous n’irons tout de même pas jusqu’à penser que l’ensemble du CA avec la diversité de composantes que l’on connait puisse être dans une logique de complot pour favoriser l’actuel DG ! Des raisons valables sous-tendent probablement leur démarche.
Le Ministère de la Santé tente un passage en force en changeant par décision le 24 Juin 2016, d’une part les deux administrateurs le représentant ; et d’autres part pour désigner le Dr Jean Chrysostome KADEBA comme Directeur par intérim pour une durée de 3 mois. Aussi en sa séance du 11 Août 2016 le conseil des ministres nommait quatre nouveaux administrateurs représentant l’Etat au CA.
Le 25 Août 2016, le tribunal administratif siégeant dans ce différend qui oppose le Ministère de la Santé d’une part et d’autre part l’actuel DG de la CAMEG et le Président du Conseil d’Administration a tranché en faveur des seconds. Il a prononcé du même coup un sursis à exécution de la décision portant remplacement des administrateurs.
Dans la foulée et contre toute attente, le récépissé d’une nouvelle association est délivré par le MATDSI.
Le Ministère de la Santé à travers un communiqué laconique persiste dans son entêtement, en arguant que le conseil des ministres a déjà statué et que sa décision ne pouvait être remise en cause par un tribunal administratif.
Cette volonté de passer outre les injonctions de la loi sonne comme un incivisme au sommet de l’état. Un tel comportement de la part du Ministre de la Santé peut avoir plusieurs conséquences. Il peut en effet entrainer :
La suspension du financement de la CAMEG par les partenaires ;
Une rupture dans l’approvisionnement des formations sanitaires en Médicaments Essentiels et Génériques (MEG), au moment où le Gouvernement a opéré un passage à l’échelle de la gratuité (ciblée) des soins pour les enfants d’âge pré scolaire ; la gratuité de l’accouchement et de la césarienne ;
Des emplois compromis pour le personnel de la CAMEG (265 agents) ;
Une précarisation de la Santé des populations.
L’UPC devant ces constats :
Invite prestement le Gouvernement et notamment le Président du Faso à mettre fin à cette situation en faisant respecter une décision de justice et en trouvant une solution durable à la crise.
Demande au Gouvernement de revoir et améliorer le management au niveau de ses départements ministériels. Nous pensons que la crise à la CAMEG résulte d’un déficit de communication et d’un mauvais management des hommes. L’esprit de défiance et le dictat devraient être bannis dans la gestion des hommes, car source de frustrations, de replis sur soi et donc de conflits.
Exhorte le Gouvernement à travailler sur les pistes d’amélioration de la politique du médicament en explorant par exemple la solution de la production locale de certains MEG pour réduire l’importation et créer des emplois stables.
En tout état de cause, nous pensons qu’on ne peut pas baisser la fièvre en cassant le thermomètre. « L’erreur est humaine, mais c’est persévérer qui est diabolique » dit un adage. Notre parti ose espérer qu’une solution consensuelle sera rapidement trouvée afin que la CAMEG se tourne résolument vers sa noble mission de mettre à la disposition de la population des MEG à moindre coût.
Ouagadougou, le 5 septembre 2016
Pour le Bureau Politique National de l’UPC,
Dr Steve Léonce ZOUNGRANA (MD, MPH, MSc)
Hépato-Gastroentérologue, Nutritionniste
Secrétaire national à la santé et à la population