Burkina: Quand le silence troublant des ONG des Droits de l’Homme inquiète

Dans une adresse à la nation express, le 30 septembre 2015, le président du Faso, Michel Kafando a déclaré, aux lendemains de la reddition des éléments du Régiment de sécurité présidentielle (RSP), « mettre fin à la rébellion sans perte en vie humaine, ni du côté des loyalistes ni du côté des insoumis. » A priori l’on ne peut nullement mettre en doute les propos du premier responsable du pays. Mais comme mieux vaut en la matière que chacun joue son rôle, les mouvements œuvrant dans le domaine de la promotion et de la protection des Droits de l’Homme doivent s’impliquer dans le bilan de cette opération militaro-politique.

Les propos du président du Faso, faisant état de zéro mort et zéro blessé, sont confirmés quelques jours plus tard (le 2 octobre) par le chef d’Etat major général adjoint (CEMGA), le colonel-major, Théodore Naba Palé : « On n’a rien trouvé sur place », affirme-t-il. Il a précisé que les fouilles continuent car la caserne est très vaste. « Nous ne souhaitons pas que beaucoup de gens s’aventurent là-bas parce qu’il n’y a certes pas eu de combats en tant que tel. Il y a eu des bombardements. Mais avant l’arrivée de nos troupes, il y a eu peut-être des mines ou autres pièges qui ont été laissés sur place. On attend vraiment de nettoyer tout le terrain avant de laisser rentrer les gens », a expliqué le colonel-major Palé. Revient-il à un officier supérieur de l’Etat-major de contredire le chef d’Etat, chef suprême des Armées. Naturellement non ! D’où notre scepticisme, pour trois raisons.

En effet, si la Croix-Rouge a été autorisée à suivre l’Armée pour une première visite des lieux ce 2 octobre 2015, il n’en fut pas de même pour la presse à cette occasion. L’autre motif de notre scepticisme se justifie par l’usage d’armes lourdes aux fins de parvenir à la reddition des derniers « insoumis » du RSP. Il y a enfin le fait que de précédentes paroles présidentielles sont restées lettres mortes. Il nous souviendra que lorsque la Cour de justice de la CEDEAO a rendu son verdict, le président du Faso dans une autre adresse à la nation en date du 16 juillet 2015 avait dit ceci : « Dans un tout autre domaine, c’est l’occasion pour moi, s’agissant du verdict de la Cour de Justice de la CEDEAO sur le nouveau Code électoral, d’affirmer que le Burkina Faso, en tant que nation civilisée et respectueuse de l’autorité de la chose jugée et de ses engagements internationaux, et dans un souci d’apaisement social, se conformera au verdict de la Cour ». La suite on la connait : il n’en fut et n’en fit rien.

C’est pourquoi ce silence assourdissant des mouvements et associations de promotion et de défense des droits de l’Homme ne s’explique pas et est même troublant. Comme qui dirait « Devant la diversité des opinions et la malléabilité des faits, la renonciation à savoir exactement et à conclure rationnellement séduit tout de suite, parce que — il faut l’affirmer — c’est une attitude de moindre effort intellectuel (...). Le scepticisme n’est pas une supériorité de l’esprit.... ».

Alors aidez-nous, mesdames et messieurs des mouvements et organisations de défense et de promotion des Droits de l’Homme, à en avoir le cœur net sur le bilan humain de l’opération de désarmement du RSP. C’est votre vocation face aux vérités d’Etat.

Neya de Gabou

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