Ceci est un écrit d’une journaliste tunisienne sur une expression du ministre de la culture.
Monsieur le ministre de la Culture, des Arts et du Tourisme, je me permets de vous interpeller, moi petite journaliste culturelle tunisienne, sur deux mots de votre discours, à l’ouverture du FESPACO, qui m’ont choquée, du moins pour l’adjectif qualificatif.
Monsieur Abdoul Karim Sango, dès l’entame de votre discours, vous avez parlé d’«intégrisme musulman». Permettez-moi de signaler que l’adjectif musulman est inadéquat ici.
En entendant de votre part «intégrisme musulman», je me suis mise à la place des 60 % de musulmans burkinabè. Car en disant cela, vous y avez intégré tous les musulmans, pratiquants ou non, intégristes ou non. Vous avez créé une sorte de schisme psychologique entre les Burkinabè, mettant d’un côté les Burkinabè musulmans, qui sont devenus, pour vous, du moins dans votre discours, tous des «intégristes», donc des méchants et des meurtriers, et de l’autre le reste de la population (chrétiens, déistes ou athées). Soit les bons, les gentils.
Je ne sais pas qui fait vos discours ou vous impose certains mots. Mais je crois sincèrement que cette personne doit bien réfléchir au choix des termes. Dire «intégrisme musulman» est très grave aussi bien pour moi que pour d’autres personnes (elles ont, autant, été choquées que moi). Avec un peu de jugeote, la personne qui fait vos discours aurait su que le terme adéquat est «intégrisme religieux», ou, à la rigueur, «intégrisme islamiste».
Je suis musulmane pratiquante, et je peux vous garantir que je ne suis pas intégrisme. Nous aussi, en Tunisie, nous connaissons, malheureusement, cet intégrisme religieux…
D’autre part, monsieur le ministre de la Culture, des Arts et du Tourisme, je me permets également de vous poser une question : pourquoi, absolument, mêler la politique à la Culture et la Culture à la politique ? Je suis venue en toute confiance au Burkina Faso, pour couvrir ce grand festival du cinéma africain qu’est le FESPACO. Je n’ai pas besoin d’un discours politique pour être tranquillisée. Si j’avais eu peur, je ne serais jamais venue et je serais restée chez moi. La Culture doit apporter au public toute chose positive : l’amusement, le plaisir, la joie, etc. La Culture est également là pour sensibiliser et éduquer.
Vouloir mêler la politique à la Culture, c’est comme si cette dernière n’avait pas lieu d’exister sans la première. Or, c’est la Culture qui fait un pays et non la politique. Car, la Culture, ce n’est pas uniquement le cinéma, le théâtre, la danse, les arts visuels, la littérature, etc. Non la Culture est tout ce que nos ancêtres nous ont légué. Sans Culture, un pays ne serait pas un pays.
Merci !
Zouhour HARBAOUI
(Tunisie)