Orange Money: l’ABCE donne de la voix

Dans cette déclaration, l’Association Burkinabè pour la consommation des biens électroniques (ABCE) pointe le non respect par Orange Money Burkina d’une instruction de la BCEAO sur la gratuité de certains services.

Les émetteurs de monnaie électronique ORANGE MONEY BURKINA et MOBICASCH, depuis un certain temps, permettent à leurs abonnés de bénéficier de certaines prestations de services notamment le dépôt d’espèces, le retrait d’espèces et le transfert entre comptes du même émetteur ou non après l’ouverture d’un compte dans leurs livres respectifs.

Aux termes de l’article 2 de la loi n°058-2008 portant réglementation bancaire, la réception des fonds du public, les opérations de crédit ainsi que la mise à la disposition de la clientèle et la gestion de moyens de paiement, constituent des opérations de banque. A l’analyse, les services rendus par les émetteurs de monnaie électronique entrent dans le champ d’application de la disposition sus citée. Mieux, dans les visas de l’instruction n°008-05-2015 relative aux conditions et modalités d’exercice des activités des émetteurs de monnaie électronique, il est visé la loi bancaire notamment ses articles 2, 3,4, 7, 42, 43, 46 ; ce qui voudrait dire que les opérations de banque accomplies par les banques, les établissements financiers de paiement et les Systèmes Financiers Décentralisés (SFD) y compris l’émission de la monnaie électronique sont naturellement concernées par la loi bancaire.

L’instruction n°008-05-2015 prévoit que les établissements de monnaie électronique sont des personnes morales autres que les banques, les établissements financiers de paiement et les systèmes financiers décentralisés (SFD) qui sont habilités à émettre et à distribuer la monnaie électronique. Ce qui n’exclue pas que les banques, les établissements financiers de paiement et les SFD dûment autorisés puissent en être émetteurs.

L’instruction n°004-06- 2014 entrée en vigueur le 1er octobre 2014 a rendu gratuit 19 services bancaires parmi lesquels les services de dépôt, de retrait et de transfert d’espèces au sein de l’UMOA/UEMOA. C’est ainsi que dans les banques, le virement ou transfert d’espèces d’un compte à un autre de la même banque est gratuit de même que les retraits d’espèce contrairement aux opérations ayant la même nature entre des banques différentes. C’est alors de bonne guerre qu’un virement d’un compte d’une banque A à un compte d’une banque B est payante.

Il peut être soutenu sans ambages que l’émission et la distribution de la monnaie électronique est une opération de banque si bien que les services de dépôts, de retrait et de transfert ou virement d’espèces dans les agences émettrices de monnaie électronique du même émetteur doivent être gratuits conformément à l’instruction n°004-06-2014 du 25 juin 2015. Il est alors étonnant de voir que nos émetteurs de monnaie électronique ORANGE MONEY et MOBICASH qui ne sauraient contester que l’émission et la distribution de monnaie électronique est une opération de banque, décident de violer de façon flagrante et notoire ces prescriptions légales.

Il nous sera opposé assurément, à tort et sans fondement, le principe de la liberté des prix et services tel qu’il résulte de l’article 4 de la loi n°017-2017 qui dispose que les prix des produits, des biens et des services sont libres sur toute l’étendue du territoire national et déterminés par le seul jeu de la concurrence, toute chose qui voudrait dire que ORANGE MONEY ou MOBICASH est libre de fixer ses tarifs comme bon lui semble, de manière discrétionnaire. Non ! Dans le cas d’espèce, le principe de la liberté des prix ne saurait être opposé aux consommateurs car, la BCEAO a entendu rendre gratuit les services de dépôt, de retrait et de transfert ou virement d’espèces d’un compte à un autre du même établissement et nos émetteurs ne peuvent aucunement se soustraire à cette disposition impérative dans l’exercice de ses activités d’émission et de distribution de monnaie électronique.

Malheureusement, les consommateurs du service ORANGE MONEY sont astreints, à compter du 1er mars 2018, par l’émetteur à payer illégalement des frais tant pour retirer que pour transférer ou virer des espèces d’un compte à un autre compte ORANGE MONEY sans y avoir consenti volontairement alors qu’il nous semble que c’est un contrat qui lie la société aux consommateurs pris individuellement. Le communiqué de la société ORANGE MONEY BURKINA informant les consommateurs du « réajustement des ses tarifs » à la hausse n’est rien d’autre qu’un « acte réglementaire » arbitraire qui ne brille que par son illégalité et son caractère abusif et doit être sanctionné comme tel. Il n’est de doute que cet « acte réglementaire » ou à tout le moins cette clause abusive permet à ORANGE MONEY BURKINA d’imposer aux consommateurs dudit service un abus de sa puissance économique en lui conférant un avantage excessif dans le contrat.

Le message subséquemment envoyé aux consommateurs leur faisant croire que le dépôt est gratuit est de la poudre aux yeux et donc une insulte à leur intelligence. En effet, il ne pouvait en être autrement et, il en a été toujours ainsi puisque c’est une obligation légale de rendre gratuit le dépôt, le virement ou transfert et les retraits à l’intérieur de la même banque, ORANGE MONEY BURKINA en est une. Il peut nous être opposé de manière inopérante que le cadre juridique d’émission de monnaie électronique est exclusivement l’instruction n°008-05-2015 mais l’ensemble des textes visés dans l’instruction prouve, à suffisance, qu’elle doit être complétée et interprétée à la lumière de ces différents textes. Mieux, la réalité économique de l’activité des émetteurs de monnaie électronique est sans ambages une activité bancaire à savoir la réception des fonds du public, la mise à la disposition de la clientèle. En conséquence, ils ne peuvent pas se soustraire aux charges inhérentes à l’activité bancaire.

Il urge davantage que la BCEAO intervienne pour préciser les obligations de ces émetteurs gloutons à l’égard des consommateurs qui payent des frais (retrait et virement d’espèces intra bancaires) qui dépassent de loin les frais de tenue de compte alors même qu’ils sont censés briser les barrières entre institutions financières et les populations aux revenus modestes du fait des frais peu élevés. Pourtant les obligations qui pèsent sur les banques au sens strict vis à vis de leurs clients sont plus lourdes que celles inhérentes à l’émission et à la distribution de monnaie électronique.

Nous ne dénions pas le droit à ORANGE MONEY BURKINA de réaliser des bénéfices sur ses activités dont l’intérêt pour les consommateurs n’est pas à démontrer et nous n’avons cessé de le dire. En ce qui concerne les opérations de transfert ou virement d’un compte ORANGE MONEY à un compte d’un autre émetteur de monnaie électronique, le montant des frais à percevoir par l’émetteur peut être discuté et non le principe même de la perception pour le moment.

S’agissant du paiement des services comme celui de CANAL +, et des factures d’eau et d’électricité où le principe de la liberté des prix est de mise, si le débiteur des frais du service doit être le consommateur et non le professionnel, on peut opiner sur le coût du service qui n’est pas de nature à encourager le commerce électronique voire les paiements électroniques. Nous allons revenir sur les déboires de certains consommateurs relatifs à l’utilisation du service notamment les paiements non consolidés et les ruptures de la fourniture d’eau ou d’électricité dont ils ont été victimes du fait des difficultés liées au bon fonctionnement de la plateforme.

Nous dénonçons aussi, par contre, la pratique consistant pour l’acquéreur d’un bien ou d’un service à payer un prix supérieur au prix réel du bien ou du service du fait de l’intégration des frais de retraits dans le prix de vente en sus des frais relatifs à l’usage du service de monnaie électronique.

Il est nécessaire tant pour les consommateurs que pour la société ORANGE MONEY BURKINA et tous autres émetteurs de monnaie électronique de s’accorder sur certaines pratiques de leurs activités qui semblent aux antipodes de la réglementation bancaire.

Mais en attendant que la société ORANGE MONEY BURKINA revienne à des meilleurs sentiments, l’ABCE informe les consommateurs que le choix entre des produits et services similaires est un droit fondamental pour le consommateur qui d’ailleurs est libre d’utiliser ou non ledit produit ou service, toute chose qui lui confère un pouvoir fatale qui ne s’exerce même pas bruyamment : LE REFUS D’UTILUSER LE PRODUIT OU LE SERVICE. Face à ce mépris doublé d’une cupidité poussée à l’extrême, le consommateur doit recourir naturellement aux offres concurrentes de monnaie électronique pour satisfaire son besoin de consommation.

En outre, l’ABCE n’exclue pas la possibilité de saisir la Commission Nationale de le Concurrence et de le Consommation (CNCC) et toute autre instance habilitée, afin de constater l’illégalité voir le caractère abusif de la « clause contractuelle » de la société ORANGE MONEY BURKINA, de même que sa condamnation à des dommages et intérêts car elle permet à l’émetteur de percevoir des frais pour les opérations de retrait et de transfert d’espèces alors même que les comptes y relatifs sont tous ouverts dans ses livres contrairement à l’instruction n°006-06-2014 du 25 juin 2014.

Bonne fête à toutes les femmes ! « Nous sommes tous consommateurs ! »

Le Bureau Exécutif National de l’ABCE

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