Éducation: des bourses offert aux » Fils à papa »

De 2010 à 2014, ils étaient plus de 400 enfants ou protégés de hauts cadres et de dignitaires, n’ayant même pas satisfait aux conditions de moyenne pour l’obtention de la bourse nationale, mais qui ont obtenu des bourses pour les études aux Etats-Unis, Canada, France, Belgique, Maroc, Tunisie, Sénégal, Russie, Turquie, Côte-d’Ivoire ou encore Allemagne. Entre autres, 277 étudiants pour la France, 96 au Canada, 34 aux Etats-Unis, 22 au Sénégal, 10 en Belgique. C’est un rapport confidentiel de l’ASCE/LC datant de 2016 qui en fait écho. Le journal Le Reporter en avait fait cas dans ces colonnes en mars 2018 sous le titre, « Bourses d’études à l’étranger : la chasse-gardé des « fils à papa » ! »

En attendant, que faut-il savoir de ces bourses ?

La révélation est faite dans un rapport classé confidentiel de l’ASCE/LC en date de 2016 et portant sur le processus d’attribution des bourses d’études et de stages de 2010 à 2015. C’est en fin 2015, que des missionnaires de l’ASCE/LC ont mis le cap sur le centre national de l’information, de l’orientation scolaire et professionnelle et des bourses (CIOSPB). Il était question pour eux de savoir si les actes d’attribution des bourses et stages, sont conformes aux textes, normes et procédures ?
Outre les manquements procéduraux, les contrôleurs de la structure dirigée par Luc Marius Ibriga, ont découvert autres choses d’anormales et même plus graves. C’est la non-adéquation et non-respect des textes régissant les bourses d’études et de stage. Une véritable magouille gouvernementale. Il s’agit de bourses dites spéciales.
Ces bourses ne sont assorties d’aucun critère d’octroi et leur attribution est à la seule discrétion du ministre en charge de l’enseignement supérieur. Les contrôleurs se sont aussi rendu compte que la plus part des bourses d’études à destination des Etats-Unis d’Amérique, du Canada, de la France, sont toutes des bourses dites spéciales.
Les noms des bénéficiaires de ces bourses ne disent pas forcément grand-chose, mais leurs performances et les profils de leurs parents ou protecteurs disent tout. Ainsi pour bénéficier de ces bourses, il faut être un protégé de profils suivants : Chercheur, premier ministre ou ministre, député, ambassadeur, directeur général, vice-gouverneur de la BCEAO, conseiller à la présidence du Faso, conseiller économique dans une ambassade, conseiller des affaires étrangères, fonctionnaire international, professeur d’université, secrétaire général de ministère, régisseur de bourses au CIOSPB, magistrat ou maire.
La magouille s’explique du fait que tous ces filles et fils qui ont eu droit à ces bourses spéciales n’ont pas la moyenne requise. Et en majorité, ils n’ont que des mentions passables. Alors que pour bénéficier d’une bourse extérieure, la moyenne requise par les textes est de 14 au minimum, avec un baccalauréat de l’année en cours.
Les contrôleurs de l’ASCE/LC ne sont pas partis de mains mortes pour décrier la pratique, « les bourses dites spéciales sont sujettes à des abus et discriminations divers. En effet, des enfants de hauts cadres et de dignitaires, n’ayant même pas satisfait aux conditions de moyenne pour l’obtention de la bourse nationale, obtiennent des bourses pour les études aux Etats-Unis, Canada, France, Belgique, Maroc, Tunisie, Sénégal », lit-on dans le rapport.
Avec tous ces constats, les missionnaires de la structure de contrôle d’Etat et de lutte contre la corruption ont égrainé des conséquences très nauséabondes telles : l’absence de transparence dans l’attribution de la bourse spéciale ; l’attribution de bourses à des candidats non méritants et/ou non éligibles (des candidats dont les parents sont capables de prendre en charge les bourses de leurs enfants) ; l’absence d’équité dans l’attribution des bourses, l’attribution de bourses sur la base de filiation/relation parentale des candidats ou sur la base politique et autre ; collusion et corruption.

Une bourse spéciale peut financer 15 bourses nationales

Le rapport sur les bourses d’études révèle également qu’en plus d’être toutes des bourses spéciales, les bourses pour les Etats-Unis et le Canada sont attribuées aux étudiants dont les parents sont capables de supporter près de 8 000 à 10 000 euros par an de frais d’études supplémentaires. L’Etat, ne prenant en charge qu’un plafond de 2000 euros au titre des frais de formation. « Toute chose qui écarte d’office les enfants dont les parents sont moins nantis financièrement », relèvent les contrôleurs. Par comparaison, ces derniers expliquent qu’une bourse spéciale pour entreprendre des études aux Etats-Unis, au Canada ou en Europe, peut financer en moyenne 15 bourses nationales à des étudiants dans des universités publiques du Burkina Faso. De ce fait, les enquêteurs concluent qu’il y a pénalisation des candidats méritants et dont les revenus des parents sont modestes et aussi, une inéligibilité injuste de certains candidats.

Radio Liberté/Ouaga

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