Le syndicat autonome des agents du ministère des affaires étrangères (SAMAE) n’est pas content du secrétaire général dudit ministère. Il l’accuse de pratiques aux antipodes de l’esprit de l’insurrection populaire d’octobre dernier. Au cours d’une conférence de presse animée le 22 octobre 2015, les militants du SAMAE ont dénoncé un certain nombre des « actes scandaleux » posés par Jacob Pasgo, avec le silence complice du ministre Moussa Nébié.
Difficile d’exercer les fonctions de secrétaire général de ministère durant cette période de transition. Des secrétaires généraux accusés d’être des collabos du CND et remerciés sans ménagement par leur ministre ou contraints à la démission par la rue, d’autres qui voient l’étau se resserrer autour d’eux. Depuis ce 22 octobre, c’est du côté des diplomates que la rue gronde. Le Syndicat autonome des agents du ministère des affaires étrangères (SAMAE) a décidé de sortir de son silence pour porter à la connaissance de l’opinion nationale « des actes et pratiques intolérables et scandaleux de la part des responsables du département ».
Le ministère des affaires étrangères ne serait pas mieux géré sous la transition qu’il ne l’était sous le régime chassé par la rue. « Les mauvaises pratiques, le népotisme, l’affairisme, le favoritisme, le copinage, l’abus de pouvoir et la gabegie n’ont jamais été aussi répugnants, surtout dans un climat où les gens ont une soif immodérée de changement », estime Rasmané Congo, le secrétaire général du SAMAE.
Le SG percevait deux salaires
Ce syndicat soutient que le secrétaire général de leur ministère de tutelle s’est rendu coupable de fautes abjectes, ne pouvant être passées sous silence. « Jacob Pasgo a été nommé Secrétaire général (SG) en décembre 2014 alors qu’il était consul général à Libreville au Gabon. Il a pris fonction le 09 décembre sans avoir cessé service en tant que consul général. Jusqu’en juillet 2015, Jacob Pasgo continuait de bénéficier de sa rémunération de consul général puisqu’étant largement plus consistant que le salaire de SG. Ce n’est que le 03 juillet 2015, suite aux actions du SAMAE qu’il a été tenu de signer sa cessation de service en tant que consul général et le 15 octobre dernier le ministre des affaires étrangères lui-même a signé un certificat de prise de service au nom de Monsieur Jacob Pasgo indiquant que celui-ci a effectivement pris service en tant que SG le 06 juillet, ce qui est absolument faux. Toute chose qui finit de nous convaincre que le ministre lui-même est complice de cette situation qui a scandalisé tous les agents du ministère », explique Rasmané Congo.
Le SAMAE reproche également au secrétaire général du Ministère des affaires étrangères et de la coopération régionale (MAECR), et même au ministre himself, de violer les textes et principes les plus élémentaires dans les affectations dans les missions diplomatiques et consulaires. « Les affectations à l’étranger sont devenues comme du marchandage parce que caractérisées par un esprit de récompense, par un copinage abject et un népotisme déconcertant », soutiennent les militants du SAMAE. Pour preuve, ils précisent que le ministre Moussa Nébié a affecté à l’étranger tous les agents de son cabinet, « des secrétaires aux chauffeurs en passant par les agents de sécurité, comme pour dire que c’est sa façon de les récompenser ». Le SAMAE dit ne pas être contre l’affectation d’agents autres que ceux du corps des diplomates à l’étranger, mais dénonce le fait d’attribuer à des agents de faux échelons et de fausses classes en vue de leur affectation à l’étranger.
Abus de pouvoir
Ils évoquent également une situation à l’ambassade du Burkina à Copenhague (Danemark) gérée de façon calamiteuse par les responsables du ministère. Un agent en fin de mission a été rappelé mais refuserait de rentrer. Le chargé d’affaires dans ladite ambassade a donc pris des mesures pour le contraindre à rentrer. Mais, le secrétaire général du MAECR a décidé de muter le chargé d’affaires parce celui-ci aurait refusé de signer un certificat de reprise de service pour un agent rappelé et qui doit rentrer. « Il s’agit d’un abus de pouvoir contre lequel nous avons le devoir de nous opposer à tout prix. C’est scandaleux et nous ne pouvons pas accepter ça », martèle Rasmané Congo.
Ainsi, le SAMAE exige :
que les affectations en cause soient reconsidérées et que soit mis en place immédiatement un comité d’affectation incluant le SAMAE ;
que toute la lumière soit faite sur les fautes graves commises par le SG suite à sa nomination à ce poste et que toutes les conséquences soient tirées de cette situation ;
que le premier conseiller à Copenhague, rappelé depuis janvier, rejoigne l’administration centrale au plus tard avant la fin de ce mois ;
que soit mis fin l’acharnement injuste contre le chargé d’affaires à Copenhague.
Pour ne rien arranger dans ce bras de fer qui se dessine, les premiers responsables du ministère auraient refusé la salle de conférence aux agents pour tenir leur conférence de presse. C’est donc à l’entrée de la salle (portes hermétiquement fermées) que s’est tenue la rencontre entre hommes de médias et militants du SAMAE.
Pour ce syndicat et ses militants, la patience n’a que trop duré. Si rien n’est fait dans un bref délai, le syndicat devrait durcir le ton. D’ailleurs, une Assemblée générale extraordinaire est prévue dès la semaine prochaine pour décider de la suite à donner à la lutte.
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