Son Excellence, Monsieur Christophe DABIRE à la Tribune de la Conférence internationale du travail le mercredi 12 juin 2019, a dit ceci : « …
Monsieur le Président,
Distingués Délégués,
Je voudrais saisir cette occasion qui m’est offerte pour rendre un vibrant hommage à tous les devanciers de notre organisation pour les efforts et les sacrifices consentis aux fins de donner un visage humain à notre société.
En effet, depuis 1919, l’OIT, la plus ancienne des Organisations du système des Nations Unies, n’a cessé d’œuvrer, avec courage et persévérance à travers les femmes et les hommes qui l’animent, pour faire de la justice et de la paix sociales une réalité dans le monde. »…
Monsieur le Président,
Distingués Délégués,
Aujourd’hui, le Burkina Faso peut se féliciter d’être en phase avec les principes cardinaux et les objectifs de l’OIT. En effet, au-delà de la ratification des conventions suivie de leur mise en œuvre, il a affirmé le rôle régalien qui est le sien de garantir le droit du travail, en créant un cadre institutionnel favorable à la promotion de ces principes.
J’en veux pour preuve, la ratification par notre pays de quarante-quatre (44) conventions de l’OIT, dont les huit (08) conventions fondamentales et les quatre (04) conventions prioritaires. ». /
Deux faits majeurs pour illustrer ma réaction :
- La loi N°044-2019/AN PORTANT MODIFICATION DE LA LOI N°025-2018/AN DU 31 MAI 2018 PORTANT CODE PENAL
Excellence a rendu « un vibrant hommage à tous les devanciers de notre organisation pour les efforts et les sacrifices consentis aux fins de donner un visage humain à notre société. ». Or, il n’y a pas de « visage humain » d’une « société » sans la liberté d’expression. C’est pourquoi, le droit fondamental à la liberté d’expression, est reconnu par la Résolution 59 de l’Assemblée générale des Nations Unies (évoquée dans votre adresse ) adoptée en 1946, ainsi que par l’Article 19 de la Déclaration Universelle des droits de l’Homme ((DUDH),1948), qui déclare que le droit fondamental à la liberté d’expression englobe la liberté de « chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit. »
La liberté d’information est aussi considérée comme « un corollaire de la liberté d’expression » par d’autres instruments internationaux importants, dont le Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966, ratifié le 4 janvier 1999 par le Burkina Faso.
C’est du reste pour cette principale cause (la liberté d’expression) :
– qu’il y a eu le soulèvement populaire du 3 janvier 1966 ;
– qu’il y a eu la grève générale des 17 et 18 décembre 1975 ;
– qu’il y a eu le CRADH du 15 juin 1995 ;
– qu’il y a eu l’holocauste du dimanche 13 décembre 1998 ;
– qu’il y a eu les rasages de têtes du 8 avril 2000 ;
– qu’il y a eu les 30 et 31 octobre 2014 ;
– qu’il y a eu la résistance au putsch du 16 septembre 2015.
D’où la protestation contre la criminalisation de l’insurrection populaire via un Code Pénal ; et comme si cela ne leur suffisait pas, on tente d’assassiner la liberté d’expression.
Par conséquent, se battre pour le retrait pur et simple de cette LOI liberticide (Article 312-11 et Article 312-13) est plus qu’un DEVOIR, et il en sera AINSI !
- L’assassinat nourrit et programmé de l’Alliance Police Nationale (APN)
D’abord, il nous est indiqué ici que notre pays, depuis son adhésion à l’ONU en 1960 n’a ratifié que quarante-quatre (44) sur cent quatre-vingt-neuf(189) Conventions à la date de la lecture de l’adresse le mercredi 12 juin 2019 à la tribune du BIT. Une Assemblée Nationale qui évolue à une vitesse d’éclaire dans le vote de lois devrait en faire autant avec les Conventions dans son contrôle de l’action gouvernementale d’autant que selon l’adresse, « Aujourd’hui, le Burkina Faso peut se féliciter d’être en phase avec les principes cardinaux et les objectifs de l’OIT. ».
Ensuite, sur « la mise en œuvre des Conventions », il est bien de rappeler que :
Primo, dans « LES REGLES DU JEU, Une brève introduction aux normes internationales du travail, Edition révisée 2014, page 15, parag.1, 4ème ligne ; et parag.2, 9ème ligne » que : « les conventions sont des traités internationaux juridiquement contraignants, pouvant être ratifiés par les Etats Membres », et que : « les pays ayant ratifiés une convention s’engagent à l’appliquer en droit et en pratique. ».
Secundo, dans « LES REGLES DU JEU, Une brève introduction aux normes internationales du travail, Edition révisée 2014, page 28, parag.1, de la 1ère à la 5ème ligne » que : « le principe de la liberté syndicale est au cœur des valeurs de l’OIT. ».
En prenant l’exemple sur une seule Convention Fondamentale, notamment celle N°87, il est écrit en son l’Article 2 : « Droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations et de s’y affilier. ». Et le « droit de constituer des Organisations sans autorisation préalable ».
Et en son Article 3 : « droit des organisations d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes d’action. ».
Enfin, ce qui se passe avec le cas de l’Alliance Police Nationale (APN) au Ministère de la Sécurité est donc une violation flagrante de cette Convention N°87, voire caractéristique d’un Etat de non-droit (refus de mise en œuvre d’une décision de justice et autres). Par conséquent, toutes les brimades (humiliations, affectations arbitraires, blâmes etc.) dans ce cadre rattraperont leurs auteurs directs et indirects et sans exception. En tout cas, nous y veillons !
- De la Gouvernance
Peut-on se réjouir d’avoir ratifié toutes les 4 Convention sur la Gouvernance et jongler avec toutes ces malversations multiples et multiformes révélées au quotidien par la presse ?
Du reste, le sort réservé aux militants du Syndicat National des Administrateurs Civils et Secrétaires Administratifs du Burkina (SYNACSAB) pendant leur marche, est assez révélateur du niveau du sérieux que nos « autorités » accordent aux lois, aux Institutions et l’Impératif de Gouvernance !
Par conséquent, je rappelle la conclusion de la Conférence du vendredi 3 janvier 2014, organisée dans le cadre de la Commémoration du 48e anniversaire du soulèvement populaire du 3 janvier 1966 : « si à un moment donné nous constatons que les intérêts du peuple sont en jeu, le mouvement syndical prendra ses responsabilités, quel que soit le régime en face ».
Donc, cette bavure législative et toute attitude apparentée seront traitées comme telles !
De Bassolma BAZIE
bassolma@yahoo.fr